La nouvelle a fait l’effet d’une bombe dans le monde de la protection animale. L’Union européenne s’apprête à prendre une décision radicale qui pourrait sceller le sort des loups sur tout le continent. Alors que les éleveurs réclament plus de moyens pour protéger leurs troupeaux, les défenseurs de l’environnement dénoncent une décision qui risque de bouleverser tout l’équilibre de nos écosystèmes.

Résumé :

  • L’Union européenne propose de rétrograder le statut de protection du loup, ouvrant la voie à des abattages plus faciles
  • La population actuelle de plus de 20 000 loups en Europe est jugée insuffisante par les scientifiques
  • Des éleveurs français appellent déjà à des tirs illégaux face aux attaques de leurs troupeaux
  • Les experts alertent sur les risques majeurs pour l’équilibre des écosystèmes européens

À Strasbourg, une réunion cruciale va déterminer l’avenir d’une espèce qui divise profondément l’Europe. La Convention de Berne, garante de la protection des espèces sauvages sur le continent, examine une proposition qui pourrait changer radicalement le destin du loup européen. Cette décision intervient dans un contexte de tensions croissantes entre éleveurs et défenseurs de l’environnement, alors même que la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a personnellement vécu la perte d’un poney suite à une attaque de loup.

Une espèce en pleine renaissance qui dérange

Le retour du loup en Europe représente l’une des plus spectaculaires réussites des politiques de protection de la faune sauvage. Avec une population estimée à 20 300 individus en 2023, le grand prédateur a progressivement reconquis ses territoires historiques, s’établissant principalement dans les Balkans, les pays nordiques, mais aussi en Italie et en Espagne.

Cependant, cette résurgence ne fait pas que des heureux. En Haute-Saône, dans l’est de la France, les agriculteurs sont montés au créneau début novembre pour dénoncer des attaques répétées sur leurs troupeaux. Plus grave encore, dans le département voisin du Doubs, le président de la Chambre d’agriculture a franchi un cap en appelant publiquement les éleveurs à « s’armer » et à « taper » illégalement les loups.

Cette situation tendue illustre le défi croissant de la coexistence entre activités humaines et prédateurs sauvages. Pourtant, comme le souligne Yann Laurans, directeur des programmes du WWF-France, « le prélèvement des loups sur les troupeaux est en réalité négligeable, de l’ordre d’un pour cent » du total des attaques en Europe.

La proposition controversée de l’UE

La proposition de l’Union européenne vise à faire passer le loup du statut d’espèce « strictement protégée » à simplement « protégée ». Ce changement apparemment technique pourrait avoir des conséquences majeures sur le terrain. Concrètement, il s’agirait de généraliser à l’échelle européenne ce que la France pratique déjà par dérogation : la possibilité d’abattre des loups selon des règles définies nationalement.

Bruxelles justifie cette évolution par une « analyse approfondie du statut » du carnivore sur son territoire et met en avant les difficultés croissantes de coexistence avec les activités humaines. La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, n’a d’ailleurs pas hésité à évoquer le « réel danger » que représenterait le loup pour le bétail et « potentiellement pour l’homme ».

Si cette proposition est adoptée lors de la réunion du comité de la Convention de Berne, elle entrera en vigueur trois mois plus tard dans tous les pays n’ayant pas formulé d’objection lors du vote, marquant un tournant majeur dans la politique européenne de protection de la nature.

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Les arguments des opposants

La réaction des organisations de protection de l’environnement ne s’est pas fait attendre. Dans une lettre adressée au secrétaire de la Convention, plusieurs ONG, dont One Voice, ont vivement critiqué cette initiative qu’elles considèrent comme « illégale » et « manquant de justification scientifique« .

Les experts remettent particulièrement en cause la méthodologie utilisée pour justifier ce changement de statut. La proposition s’appuierait en effet sur « un rapport unique, non révisé par des pairs, produit par un cabinet de conseil » sous contrat avec la Commission européenne. Pour Yann Laurans, la population du loup est « encore assez fragile » malgré les apparences, et son affaiblissement risquerait de « fragiliser l’ensemble de la santé, déjà assez peu robuste, de l’écosystème européen« .

En France, où la population de loups a connu une baisse de 9% en 2023 pour atteindre 1 003 individus, la situation est particulièrement préoccupante. Avec environ 20% de la population abattue chaque année, les défenseurs de l’environnement craignent qu’un assouplissement supplémentaire des règles de protection ne mette en péril la survie même de l’espèce. Le Premier ministre Michel Barnier a d’ailleurs déjà évoqué la possibilité d’augmenter les abattages, qualifiant la prochaine évaluation officielle du nombre de loups de potentiel « moment clé« .

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