Une étude fascinante vient de révéler l’existence d’un véritable système démocratique chez les gorilles de l’Ouest, pulvérisant des décennies de théories scientifiques sur leur organisation sociale. Dans les forêts d’Afrique centrale, ces grands singes organisent de véritables « votes » avant de prendre leurs décisions collectives. Cette découverte spectaculaire bouleverse radicalement notre vision du règne animal.

Résumé :

  • Les gorilles pratiquent un système de vote avant leurs déplacements en groupe
  • Le mâle dominant n’est pas l’unique décideur comme on le pensait jusqu’à présent
  • Un véritable quorum est nécessaire pour valider les décisions collectives
  • Cette découverte rapproche leur comportement de celui d’autres espèces sociales comme les suricates

Qui aurait pu imaginer que les gorilles, ces imposants primates, cachaient dans leurs forêts un système de prise de décision digne des plus grandes démocraties ? C’est pourtant la stupéfiante révélation d’une étude publiée cette semaine dans la prestigieuse revue Proceedings B de la Royal Society britannique. Cette découverte, fruit d’une minutieuse observation menée pendant près d’un an, remet profondément en question notre compréhension de ces fascinants grands singes.

La hiérarchie des gorilles cachait un système révolutionnaire

Pendant des décennies, les scientifiques pensaient avoir cerné l’organisation sociale des gorilles de l’Ouest. Le schéma semblait simple : un mâle dominant, reconnaissable à son dos argenté, dirigeait d’une main de maître un petit groupe composé de femelles et de leurs petits. Son impressionnante carrure – près de 160 kilos, soit deux fois le poids d’une femelle – et son statut de dominant semblaient faire de lui le décideur naturel des mouvements du groupe.

Pourtant, cette vision s’est révélée beaucoup trop simpliste.

Lara Nellissen, doctorante à l’Université de Neuchâtel et auteure principale de l’étude explique :

« Pour les gorilles, il est crucial de maintenir la cohésion du groupe »

Cette nécessité a donné naissance à un système de décision collective bien plus sophistiqué que tout ce qu’on imaginait jusqu’alors.

Quand les gorilles réinventent la démocratie

Ce qui rend cette découverte particulièrement fascinante, c’est la façon dont les gorilles expriment leur opinion. Avant chaque déplacement, le groupe s’engage dans une séance de « vote » où chaque membre adulte peut faire entendre sa voix – littéralement. Les chercheurs ont observé une augmentation significative des vocalisations dans les cinq minutes précédant chaque mise en mouvement du groupe.

Ces « votes » prennent la forme de grognements, minutieusement répertoriés par l’équipe de recherche. Plus surprenant encore, tous les adultes du groupe peuvent initier un départ, une initiative qui sera suivie dans deux tiers des cas. Si cette démocratie gorillesques suit une certaine hiérarchie – les individus de rang supérieur, notamment les dos argentés, initiant plus fréquemment les départs – elle n’en reste pas moins ouverte à tous les membres adultes du groupe.

Cette découverte n’aurait pas été possible sans un travail de terrain exemplaire. Pendant onze mois, dans l’aire protégée de Dzanga Sangha, au sud-ouest de la République centrafricaine, l’équipe de recherche a suivi trois groupes de gorilles. Un travail de fourmi rendu possible grâce à la collaboration précieuse des pisteurs Ba’Akas, des chasseurs-cueilleurs autochtones dont l’expertise s’est révélée indispensable pour identifier les vocalisations individuelles au sein du groupe.

Une leçon de sagesse venue de la forêt

Cette découverte place les gorilles dans un club très select d’espèces pratiquant la décision collective, aux côtés des suricates, des chiens sauvages et des macaques Tonkéan. Plus fascinant encore, les chercheurs ont identifié l’existence d’un véritable quorum : une fois qu’un nombre seuil d’individus s’est prononcé en faveur d’un déplacement, le groupe entier adopte ce comportement.

Cette organisation sociale sophistiquée n’est pas un simple hasard. Elle répond à des contraintes écologiques précises. Le régime alimentaire des gorilles de l’Ouest, largement basé sur les fruits, les contraint à des déplacements constants et nécessite une connaissance intime de leur territoire. Dans ce contexte, la prise de décision collective permet de maximiser les chances de survie du groupe en exploitant l’expérience de tous ses membres.

Cette découverte extraordinaire sur le processus démocratique des gorilles ne fait probablement qu’effleurer la surface des mystères que recèlent encore ces fascinants primates. Alors que nous pensions tout savoir de leur organisation sociale, ces grands singes nous démontrent que la démocratie n’est pas l’apanage de notre espèce, ni même de nos sociétés modernes.

Plus qu’une simple curiosité scientifique, cette révélation soulève des questions fondamentales sur l’évolution des comportements sociaux dans le règne animal. Si les gorilles ont développé un système de prise de décision collective aussi sophistiqué, combien d’autres espèces cachent encore des formes insoupçonnées d’intelligence sociale ?

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